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Ladj Ly à Cannes : "Il faut agir, il faut produire des films"

Présenté en compétition mercredi 15 mai, Les Misérables a été ovationné par le public et salué par la presse. Avec ce premier long-métrage, Ladj Ly, infatigable documentariste de la banlieue qui l'a vu grandir, tape un grand coup sur la croisette. Cinewax l'a rencontré.

Voici un avant-goût de l'interview, avant la version longue en vidéo ! 

Cinewax - Quelle est l'origine du film "Les Misérables" ? 

Il y a à peu près dix ans, j'ai filmé une bavure policière à Montfermeil. Suite à cela, j'ai diffusé la vidéo sur internet. Toute la presse l'a reprise. Il y a eu une enquête de l'IGS, la police des polices. Et des policiers ont été suspendus. Voilà la genèse des "Misérables". 

Cinewax - "Les Misérables", c'est donc un long-métrage de fiction inspiré d'un fait réel... Quelle est à ton avis la puissance de la fiction pour montrer la réalité des banlieues ?

Moi je viens du documentaire. Et se mettre à la fiction, c'est un exercice difficile. Cependant, j'y ai ajouté ma patte. Finalement, dans "Les Misérables", on ne sait plus vraiment si on est dans de la fiction ou dans du documentaire. Si j'ai voulu passer à la fiction, c'est parce que la plupart du temps, mes documentaires n'étaient pas diffusés à la télévision, car ils ne rentraient pas dans les cases. J'ai donc été amené à diffuser mes films sur internet. Mais aujourd'hui, j'ai envie de toucher plus de monde. 

"365 jours à Clichy-Montfermeil", documentaire de Ladj Ly sur les émeutes de 2005 dans les banlieues françaises

Cinewax Selon toi, quel est le pouvoir du cinéma dans la lutte contre l'invisibilisation de certaines populations ?

Il faudrait déjà qu'on nous donne accès au cinéma pour qu'on puisse raconter nos histoires. Ce qui me soule aujourd'hui, c'est qu'on a tendance à vouloir raconter nos histoires à notre place, clairement. Et ça, je voudrais que ça change. C'est pour ça que je lance ce film et qu'à côté j'ai lancé une école de cinéma qui s'appelle l'école Kourtrajmé, où l'on a décidé de former la nouvelle génération aux métiers du cinéma pour que les jeunes puissent à leur tour prendre la parole et s'exprimer sur le grand écran. 

Cinewax - Tu vas d'ailleurs ouvrir cinq nouvelles écoles de cinéma sur ce modèle dans cinq pays africains... Quels sont tes rapports avec les cinémas d'Afrique ? 

Cela fait déjà dix ans que la boîte de production de Kourtrajmé Africa existe. Depuis, on a soutenu plein de projets artistiques sur le continent, mais ça restait des documentaires ou des courts-métrages et on s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup de lacunes. C'est pour ça qu'on a décidé de donner aux jeunes africains les clefs pour qu'ils puissent à leur tour raconter leurs histoires. Moi, je n'ai pas de lien spécial avec les cinémas africains, mais je m'intéresse à l'Afrique en tant qu'africain, car je suis d'origine malienne. Je suis très impliqué au Mali et j'ai envie de développer le cinéma dans toute l'Afrique. 

Cinewax - Il y a un an, le mouvement "Noire n'est pas mon métier"  mettait sur la table la question de la diversité dans le cinéma français. Est-ce que cette année les choses ont changé ? 

Il est vrai que le cinéma reste un milieu assez fermé, mais je pense qu'il faut bosser, qu'il faut s'accrocher, qu'il ne faut pas lâcher l'affaire. Je ne sais pas si la plainte est la solution aujourd'hui. Il faut agir, il faut écrire des films. C'est ça que je porte avec l'école Kourtrajmé. On va former ces jeunes pour qu'à leur tour ils puissent faire des films avec de la mixité. C'est ça mon concept. Aujourd'hui, il faut faire. 

Retrouvez bientôt la totalité de l'interview en vidéo ! 

Propos recueillis par Sidney Cadot-Sambosi et Maël Noubissié 

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